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Les tourbières de la RDC stockent en moyenne 1712 tonnes de carbone par hectare

Véritables héros silencieux et immergés de la séquestration du carbone, les tourbières couvrent près de 3 % de la superficie terrestre. La plus grande étendue de tourbière connue au monde, située dans la Cuvette Centrale du bassin du Congo.
La tourbe est une matière végétale partiellement décomposée. Lorsque les arbres, les feuilles et les racines meurent, l’engorgement des marais tout au long de l’année empêche leur décomposition complète. Une couche de tourbe se forme alors lentement.
Le carbone accumulé au cours de la croissance des plantes est ainsi capturé dans la tourbe, qui agit donc comme un véritable puits de carbone.
Si les tourbières s’assèchent, en raison de changements dans l’utilisation des terres par exemple, la décomposition de la tourbe peut reprendre, libérant ainsi dans l’atmosphère le carbone qu’elle stockait.

Dans une nouvelle étude publiée dans Nature Geoscience, une équipe internationale de chercheurs a mis en évidence de vastes tourbières dans le centre du bassin du Congo, couvrant 16,7 millions d’hectares, soit plus de cinq fois la superficie de la Belgique. Par endroits, la tourbe peut atteindre 6,5 mètres de profondeur.

Les chercheurs révèlent que ces tourbières stockent entre 26 et 32 milliards de tonnes de carbone, soit l’équivalent de trois ans d’émissions mondiales de combustibles fossiles. Le bassin central du Congo abrite 36 % de la superficie mondiale des tourbières tropicales et stocke 28 % du carbone des tourbières tropicales du monde.

La quantité de carbone stockée dans cette zone de tourbières est équivalente à celle de tous les arbres de la forêt tropicale du bassin du Congo.

Nos résultats soulignent l’importance des tourbières congolaises en tant que réserve de carbone d’importance mondiale, explique Bart Crezee, chercheur de l’Université de Leeds et auteur principal de l’étude.

La quantité de carbone stockée dans cette zone de tourbières est équivalente à celle de tous les arbres de la forêt tropicale du bassin du Congo. Il ne faut pas sous-estimer l’importance cruciale de préserver ce carbone stocké dans les tourbières tropicales dans la lutte contre le réchauffement climatique.

Seulement 8 % de ce carbone tourbeux se trouve dans des aires protégées, ce qui suggère une vulnérabilité aux changements futurs d’utilisation des terres. Ainsi, fin juillet 2022, un million d’hectares de ces tourbières sont mis aux enchères pour l’exploitation pétrolière par le gouvernement de la RDC.

Les marais tourbeux du centre du Congo sont actuellement l’un des écosystèmes les plus denses en carbone sur terre, stockant en moyenne 1712 tonnes de carbone par hectare dans la tourbe. C’est plus de 7 fois plus qu’une forêt “normale” sur sol sec, explique Wannes Hubau, chercheur au Musée royal de l’Afrique centrale qui a participé à l’étude.

Ces tourbières sont souvent dans des zones reculées et elles ont été relativement peu perturbées jusqu’à présent. Leur exploitation pourrait avoir un effet désastreux sur la gestion du changement climatique.

Comment les tourbières affectent-elles le changement climatique ?

Les tourbières sont si efficaces pour stocker le carbone qu’elles contiennent un quart du stock mondial de carbone du sol, soit deux fois celui des forêts de la planète. Mais lorsqu’ils sont drainés, dégradés ou brûlés, ils s’oxydent et s’érodent, et tout ce carbone retourne rapidement dans l’atmosphère.

Par exemple, lorsque les tourbières indonésiennes ont pris feu en 2015, elles ont émis environ 1,6 milliard de tonnes de gaz à effet de serre dans l’atmosphère, soit à peu près la même quantité que celle produite par le Brésil cette année-là.

Dans de grandes parties de l’Arctique et de l’Antarctique, une couche de tourbe recouvre le pergélisol et l’empêche de fondre. Mais les pôles se réchauffent trois à quatre fois plus vite que le reste de la planète, mettant ainsi ces tourbières en danger.

À l’échelle mondiale, les émissions provenant des tourbières drainées et brûlées représentent actuellement environ 5 pour cent de toutes celles causées par l’activité humaine.

Nous devons donc donner la priorité à la restauration des tourbières du monde pour atténuer la crise climatique et, plus important encore et de manière rentable, pour empêcher leur dégradation en premier lieu.

En plus de séquestrer le carbone, les tourbières abritent une riche diversité de biodiversité. Ils contribuent également à l’adaptation au climat en minimisant les risques d’ inondations , de sécheresse et d’incendies de forêt, et ils stockent et filtrent d’importantes sources d’eau douce : la majeure partie de l’eau potable d’Écosse, par exemple, est filtrée à travers les tourbières .

Les tourbières humides abaissent les températures ambiantes et sont moins susceptibles de brûler en cas d’incendies de forêt. Elles sont également utilisées pour toute une série d’activités de subsistance et culturelles, fournissant des ressources telles que de la nourriture, des fibres et d’autres produits.

Quelles sont les principales menaces qui pèsent sur les tourbières ?

Les précieuses tourbières de notre planète disparaissent trois fois plus vite que ses forêts. La plus grande menace pour les tourbières est le drainage destiné à d’autres utilisations des terres. Environ 15 pour cent des tourbières de la planète ont déjà été drainées pour l’aménagement du territoire et l’agriculture.

Dans certains endroits, les tourbières sont également « exploitées » ou « coupées » pour produire du combustible, ce qui les endommage et peut provoquer leur assèchement.

Une autre menace majeure est la pratique consistant à brûler les tourbières pour encourager une nouvelle croissance du bétail, pratique courante dans de nombreuses régions d’Asie du Sud-Est .

Ces incendies peuvent facilement devenir incontrôlables, car les feux de tourbe couvent sous la surface, ce qui les rend très difficiles à éteindre. Ils émettent une fumée très épaisse qui peut également entraîner une pollution atmosphérique importante et des conséquences néfastes sur la santé humaine.

La Convention de Ramsar, par exemple, appelle actuellement à la protection de toutes les tourbières restantes contre le drainage et à la restauration d’au moins 50 pour cent des tourbières dégradées d’ici 2030, afin de s’aligner sur l’objectif de l’Accord de Paris visant à limiter le réchauffement climatique à 1,5 degré Celsius.

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